jeudi 30 août 2012

Histoire d'une réplicante [court-métrage]



Loom, court-métrage de Luke Scott (fils de Ridley Scott) prenant place dans l'univers de Blade Runner.
(Même si l'on semble ici plus proche de la création de clones biologiques à la croissance accélérée, que d'entités biomécaniques-IA).

Manifeste du Mur Bruitiste (HNW) (2008)


"L’individu n’a plus d’autre alternative que de refuser en masse la vie contemporaine promue et prônée. Le comportement juste se trouve dans le bruit et le repli, dans un refus de capitulation à la manipulation, à la socialisation, au divertissement.
Le Mur Bruitiste ne promet pas de redonner un sens et des valeurs à l’existence vécue. Le bruit opaque, morne et continu permet une réduction phénoménologique totale, un moyen contre l’interpénétration existentielle: désengagé dans l’apaisement bestial pur et inaltéré.
Le Mur Bruitiste est pro anomie, l’anomie volontaire. Il remet en question l’institution de toute relation, annihile tout ce qui survient dans un repos menaçant.
Le Mur Bruitiste est une récusation sociale. Il récuse toute notion de groupe, communauté, organisation et admet l’alternative de la claustration postmoderne hikikomori. Le refus est dans le repli car tout acte –qu’il soit considéré futuriste, dada, situ, anarchiste ou straight edge- est devenu inapte. L’actionnisme du délabrement ne peut faire face à la récupération factice, à la prostitution, de notre civilisation dérivative.
Observer l’extérieur abject ne doit être qu’un dernier rappel du non-sens humain avant l’épochè contestataire. Toute chose et tout être deviennent sans signification.
Le Mur Bruitiste est la perte de conscience du temps pour vivre en abîme et se laisser couler dans l’instant.
Le Mur Bruitiste est la perte de conscience physique.
Le Mur Bruitiste est la pratique ininterrompue du bruit mental.
Le Mur Bruitiste est la pureté militante dans la non-représentation.
Vigilants des derniers soubresauts, adoptons une nouvelle posture dans le repli – ni soumission, ni fuite, ni fléchissement – afin de pouvoir affirmer « je n’ai jamais été là » dans le désert créé par l’effacement de notre environnement. Perdre tout espoir est la liberté.
Dans l’isolement du mur bruitiste, le néant cellulaire, devenir son ombre - impassible meurtrier de soi - et ainsi devenir l’ombre de l’homme, inconnaissable, impersonnel.
Dans le Mur Bruitiste, aggraver son être, se tenir ignoré et ignorant de tout ; le repli exige l’élaboration d’une indétermination pure qui se forge dans l’oubli des éléments contraignants émotionnels et intellectuels.
Le Mur Bruitiste, obscurité d’un calvaire spirituel, est la non-opposition entre l’être et le néant, une berceuse sans fin.
Le Mur Bruitiste répand ses vertus occultes par les vrombissements et les bourdonnements de ses formules hermétiques, il désagrège et appelle à la désintégration irrévocable."

Je ne suis pas vraiment d'accord sur le fond, avec l'isolationnisme hikikomori, le côté pro-autisme, le nihilisme "délabré", mais bon, je trouve le texte très bon en lui-même, et toute personne tripant sur la musique a un moment ressenti (et donc comprendra) ce qui est dit ici. La jouissance souveraine du bruit/son pour mettre à distance une civilisation à chier, un monde à vomir.
Ce manifeste "Vomir" daterait d'octobre 2008, si j'ai bien compris l'auteur est Roro Perrot. Son site : www.decimationsociale.com
Cela m'est arrivé via Lucille Calmel, elle-même via Cdrik Croll, merci à eux.

Molmot : "Brainwashed" (suite)



"Brainwashed" par Molmot

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Molmot est à sec de peinture donc ça devrait s'arrêter là !

mardi 28 août 2012

lundi 27 août 2012

Molmot : "Brainwashed"




 "Brainwashed" par Molmot

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dimanche 19 août 2012

Ichtyor Tides :: Mortisle Elytrion (noisy & gritty poetronica)



Premier LP d'Ichtyor Tides, projet expé/noise/poésie de Nikola Akileus.
Edition limitée de 100 CDr en digipack + version numérique (mp3, FLAC, etc.).
Disponible ici : http://ichtyor-tides.bandcamp.com/album/mortisle-elytrion
[dessin de couverture : g.cl4renko]

samedi 18 août 2012

A l'autre bout du monde



C'est dans ces moments-là qu'on aimerait trouver un billet de cinquante euros à côté de soi, m'a-t-elle dit.

On habitait ensemble depuis six mois déjà, et on s'entendait bien. Il y avait des disputes. Dès fois, c'est moi qui ne disait pas grand chose, dès fois, elle.

Elle était vindicative, fière, apeurée, comme ce point de scission entre deux mers qui se rencontrent, loin dans l'océan.
J'étais amoureux, j'étais nul en maths, je n'essayais pas d'être fier et j'essayais d'être fier.

J'avais presque fini la faculté. Je m'étais courageusement décidé à faire sept premières années et arrêter. Puis je me suis installé avec elle, et nous nous promettions, nous nous promettions de courir le monde. L'avantage de courir le monde avec une nana comme ça, c'est qu'elle est belle. Je veux dire, quelles grandeurs peut ne pas manquer à son sein ? Laquelle, dites-le moi, je n'arrêterais pas de la dévorer.

Elle est une descente vers le vieux port et une pêche à l'espadon. Alors je n'ai rien appris que pour elle.




Un jour de haut soleil, nous prîmes le train et partîmes, dépassant Pancho Villa, Lausanne, Mexico, Singapour, faisant l'amour dans le train, sur la couchette du haut, car la couchette du bas, prise par mille chats.
En dépassant Singapour, nous fîmes la rencontre d'un vieux monsieur, dans le quartier attenant à la gare. Il nous expliqua être seul depuis l'âge de ses 20 ans. Tout a commencé lorsqu'il s'en alla de chez ses parents pour rechercher la vraie vie. Il loua un appartement dans l'Upper East Side, et le jour d'après, le soleil lui semblait le même. Pestant que cela n'était pas possible, il se rendormit mais devant sa fenêtre. Pestant, pestant, il ne dormait pas. Et il roucoulait quelque fois vers les femmes, quelque fois vers lui-même. Trompant le temps, il allait dans les mines de charbons pour y travailler. Mais ce travail ne durera pas toujours. Et ce travail ne dura pas toujours. Nous l'écoutions attentivement, et le soleil perdura encore un peu sur la gare, sans que ça ne devienne trop sentimental.

Puis il s'est endormi dans l'herbe, et nous sommes allés chercher un hôtel. Ce n'est pas que nous en avions marre de lui, il était juste tard, et vers Singapour, seuls les hôtels servent à manger le soir. Il n'y a rien sinon.
Traversant les rues qui, d'entrefilades en entrefilades, se retrouvaient elles-mêmes, nous fûmes forcés d'atterrir, et ce fut devant un bâtiment dont l'éclairage invitait au sourire. L'hôtel San Diego ; eh oui, de grosses lettres le proclamait.

A l'intérieur de l'hôtel San Diego, à l'intérieur, un chaton me regarde. Ce chaton appartient à une maîtresse, qui a une maîtresse. C'est la patronne de l'hôtel, Odessa. Elle a soixante ans, et déploie une chevelure abondante, brune et bouclée partout partout. San Diego et Odessa ne serait rien l'un sans l'autre. Et Odessa voisinait avec les voyageuses qui passaient par là, et qui ne s'ennuyaient pas. Car, oui, en effet, elle pouvait être très vite énervée, et ça n'allait pas sans déboires. Mais ça les prenaient, et de leurs témoignages, ça les faisaient voyager. Alors, oui, elle avait des maîtresses, mais comprenez bien que ça n'en faisait qu'une.

Je ne l'ai pas reconnue en ouvrant la porte, mais Odessa était une de mes camarades de lycée. Jadis, quand elle parlait, elle poussait de grosses vapeurs. Mais c'est fini maintenant, je la trouve plus raisonnable. Elle nous prêta et nous conduit vers une chambre de l'hôtel Odessa. En chemin, nous fîmes la connaissance d'enluminures particulièrement baroque.

Au sortir de la nuit, au réveil de la chambre, nous vîmes des dizaines de gangsters parcourant l'hôtel. Certains buvaient du thé. Des gangsters buvant du thé ? Mais à chaque fois que nous tendions l'oreille, ils parlaient meurtre, ils parlaient décapitations, ils parlaient tendons à l'oreille et couillons de cou. Je ne pris aucune peur, cela non, je ne suis pas de ce genre là. Je protégeais mon amie, pour tout dire, en lui bouchant les oreilles. Nous descendîmes vite fait bien fait entre enluminures baroques et nœud papillons tachés de sang, jusqu'à la sainte Odessa.

A la question, la réponse fut qu'elle louait ses salles, ses chambres et ses allées aux nécessiteux, et une confrérie de gangsters ne devait pas faire exception. Ces gens avaient un énorme besoin d'attention, alors pour discuter affaires, ils allaient chez la plus aimante. Odessa leur fournissait du temps pour parler. En ce moment, le chef et ses sous-fifres étaient empêtrés dans une affaire d'assassinat, assassinat fait sans l'autorisation du parrain.

On avait mis à mort deux frères, sur le sable du désert. Ils avaient trichés au jeu. Normal, donc. Mais aucune élimination ne peut être réalisée sans l'accord du parrain, du parrain vous dis-je ! Odessa vint nous faire part de leurs problèmes. Mon amie leva sa main très haut. Je ne connaissais plus mon amie, vous dis-je ! Et elle eut la permission de parler. Car Odessa nous avait accueillis, accueillis et nourris, et aimés, peut-être, un tout petit peu ; mon amie sentait en elle le besoin impérieux de lui rendre la pareille. Après en avoir discutés, nous décidâmes d'aller parler au parrain pour elle et pour eux. Les gangsters étaient apeurés.
Nous traversâmes un parc, sur un petit chemin le serpentant. Le reste était gorgé de fleurs, et le soleil tombait à pic à travers les falaises. Au beau milieu du merveilleux, une question : quelle stratégie ? Elle veut lui apporter quelques bières, ouvrir la porte, lui expliquer. Il est prévu qu'il pleure. Arrête, arrête, même le lecteur trouve que c'est de la drague ! Tu te fâches ? Je te laisse toute seule. Tu ne te fâches plus ? J'arrive, mon amie, j'arrive. Pour ma part, je pensais plus à une opération mêlant politique et militaire : nous le forçons à sortir, nous allons avec lui sur les chemins. Une fois loin, un choix cornélien s'offre à lui : soit il accepte nos conditions, qui sont celles des gangsters transmises par Odessa, soit nous le frappons à mort. Je ne lésine pas sur mes mots. Tu as déjà frappé ? Je t'apprendrais, je t'apprendrais tout.

Dring, driiiiiiing. Qu'est-ce qu'il y a ? Je suis occupé, et non, et non, et non, revenez plus tard. Nous sommes ici pour un problème. Le dernier problème, c'est vous. Et là, ce connard sort son flingue, il me le fout sur la tempe. D'un geste rapide, j'éjecte le flingue vers le haut. Le parrain repère le flingue et s'apprête à le rattraper – spectacle de cirque. Je tape le flingue du plat de la main – engagement de basket, et le parcours de celle-ci se finit sur le nez du patron, qui craque.
Enfin, nous entrons. C'est un estuaire empli de femmes mortes. Je frissonne, le gars a des problèmes. Mon amie ne dit rien en tordant le nez. Je la reconnais, je vois qu'elle ne voit pas bien. Elle pleure, elle l'a connue. Au centre de la pièce, un rideau, des traces de pas. D'un geste de la main, elle m'emmène là-bas. Il y avait toute ma peur, elle me l'a montrée sans chichis. Elle ne voulait pas me tuer, et moi je ne pensais à rien en refermant le rideau. Mieux : j'envoyais le parrain ad patres en lui brisant le cou. Il ne pouvait plus bouger après.

Un mot de résolution : la main-mise du parrain sur ses employés se termina avec la mort de ce dernier. Je n'en suis pas mécontent, même si la péripétie est trop volatile en soi pour être discuté. On peut s'engoncer dans un blabla-blabla métaphysique, on peut s'y perdre, si les résultats sont là, pas de problème. Nous avions résolu une crise de la pègre, et aujourd'hui les Thompson 1928 chantent encore nos mérites.

Nous partîmes, de l'hôtel, de la ville, vers Oulan-Bator.


Il y avait un petit train, du genre scintillant et résistant, qu'il fallait prendre pour traverser les montagnes. La neige tombait avec le soir et l'altitude, et nous étions gelés. Je ne pouvais comprendre le tracé de ce train, dusse-je mourir en essayant. La carte que j'avais sous les mains ne correspondait rien aux balancements du voyage. Mon amie sentit que cela, je ne le contrôlais pas, alors elle me serra contre ses seins, et tangua de plaisir, comme elle l'a toujours fait.
Même maintenant, je n'en peux plus de me demander pourquoi nous nous arrêtâmes en pleine nuit sur un col venteux et fouetté par la neige. J'invente, je n'invente pas et je n'y crois pas un mot.
J'étais le premier à ouvrir l’œil. Dans le noir du wagon, je vis mon amie, tombée endormie, et tous les autres voyageurs, en position fœtale tout autour d'elle. Afin de me dégourdir les jambes, j'allais jusqu'au wagon-bar en écluser deux, trois. Comme une araignée, je passais à travers les wagons. A peine arrivé au wagon-bar, à peine servi par un barman plus réveillé que mort, je pris ma première motte sur l'arrière du crâne. Effet boule de neige. Le grognement de dieu. Je suis croyant. De la neige de la neige de la neige nous fend tous le crâne. Les wagons sont projetés dans la montagne. Le chaos nous rapproche mon amie et moi, je la plaque sur mon sternum et l'entraîne dehors. Une minute après, le train se casse en deux, laissant chaque partie descendre la montagne vêtue d'hurlements triomphants. C'est alors que le froid rampe dans nos inconscients pour y éclater.

Elle était belle la neige. Ah, elle était belle la neige. Elle faisait un bel éclat sur nos crânes endormis. Nous dormions malheureusement, et sans la faculté de se projeter à l'extérieur de son corps, à ce moment précis, nous n'étions plus rien. Le vent se pointa avec le soleil et nous réveilla. Je réussi à m'extirper de la neige crasse, pour ensuite en tirer mon amie. Autour de nous, tout était escarpé et blanc. Le soleil n'était pas si loin que ça. Un moment de plus là-bas l'aurait inciter à se rapprocher encore et encore, nous ne pouvions nous le permettre. Nos deux personnes, prenant le relais du train aujourd'hui disparu sur les rails, descendirent la montagne. Cheminant, nous nous parlions : la haine de la mayonnaise, la haine du ketchup, les condiments, voilà, voilà, c'était elle, et je ne pense qu'à elle. Je la voyais vivre dans tous les lieux, parler dans tous les arts, et de toutes les langues, c'est la mienne qu'elle tenait par le bout du nez. Nous passâmes grognements sur grognements avant d'atteindre le premier village.

Dans ce gris et tendre village, nous passâmes pour des agressifs des montagnes. Je rudoyais les habitants alors qu'ils m'offraient, qu'ils pansaient des blessures que je n'avais pas. Mon amie leur parlait une langue gutturale, mais elle parlait comme eux ? Nous fûmes conduits chez le chef du lieu. C'était la seule solution, vu la tournure que cela prenait. Dans une hutte, à l'orée du village, se trouvait le quidam qui ne se trouvait pas là. Alors sa maison était emplie de fleurs ; alors, nous entrâmes et les gens refermèrent la porte brutalement. Les cailloux commençaient à pleuvoir de toutes fenêtres. Mon amie, se touchant nerveusement le front, commençait à pleurer. Deux cailloux me touchèrent consécutivement les tempes, si bien que ses pleurs devinrent un supplice. J'enrageais, j'enrageais. Je sorti dehors par une des fenêtres brisées, l'orée du soleil touchait la terre. Ils étaient en rond, tous en rond autour de la maison. Je ne pensais pas mourir, mais je savais pertinemment que je n'avais pas beaucoup de temps pour les convaincre. J'inspirais un bon coup et levai une soudaine voix :

« Enfants, faut-il s'apaiser ? Pourquoi déposer les armes ? La paix n'a jamais été une option, ni pour vous, ni pour nous. Nous devons conquérir, et pour cela, il nous faut enflammer nos conflits, et pour cela, il nous faut enflammer nos cœurs. Je vois bien que ce mouvement est en train de se ternir, que cette flamme s'efface comme les vingt ans d'un octogénaire qui eût une santé de fer encore et encore. La vie m'a offert cette santé de fer, je l'ai. Je la sacrifie pour vous, pour vous. Une condition, alors, combattez l'ennemi, n'acceptez rien. Mourez pour vous, pour vous, votre santé de fer, vos enfants. » Je pense :
« C'est somptueux. Que faire ? Après moi, l'acné. »

Ils m'ont poussés. Je suis tombé. Et, quatre heures durant, ils m'ont examinés, là, gisant sur le sol. Je n'ai pas sourcillé, pas moi, je n'ai pas souri. Ils sont partis, penauds. Mon amie s'est précipité vers moi, et, d'un même mouvement, nous nous sommes précipités plus profondément la vallée. Ils faisait noir, noir-disparaître, mais mon amie nous guidait, elle nous guidait.

Avec la nuit, la montagne pleurait ses éboulements. Avec la nuit, nous tombions de sommeil dans un refuge fait de bois et de pierres, trouvé au bord du chemin. Nous n'avions rien mangé. Oulan-Bator était encore loin ; je pleurais Oulan-Bator mais mon visage ne le montrais pas. La lueur du feu fait de feuillages éclairait nos regards. Je l'aime. Elle s'était couverte de pierres et de feuillages, car elle voulait se cacher de la vallée dans la vallée, non. Elle se dévêtit, dévêtit devant moi. Moi non, moi si. Moi oui, et nous avons profité de la nuit dans la vallée de la vallée.

Je me suis réveillé à six heures cinq. J'avais mal à l'épaule – ma position chien-de-fusil toute la nuit. A la jambe, le rocher pointu. Accrocs de nuit, tendons meurtris, on ne peut rien y faire. J'en ai marre de ces nuits de merde. Alors je me lève, je suis pépère, je suis tranquille, désespéré. Soulevant la tête de mon amie pour déposer un baiser sur ses lèvres pourpres et endormies, je vois un voile laiteux et transparent tomber sur ses yeux. Ses paupières, elles tombent mais elles ne tombent pas.
Elle me dit d'une voix claire et forte : « j'ai mis du rouge à lèvres cette nuit », folle, elle est folle. Je la prends en la sortant dehors. Soulevant ce jolie visage, j'imagine que le soleil qui naît dans la vallée saura réveiller ces paupières endormies. Elle s'effondre en hurlant dès que le soleil éclate. J'hurle à mon tour, j'hurle, je n'en peux plus. Je la hisse sur mon dos, très rapidement, comme un sac à patates, et me met à courir vers le bas. Le paysage s'éparpille autour de moi. A chaque seconde, je risque d'exhaler mon dernier souffle. L'onde de son corps frappe sans ménagement la rivière qui serpente au fond de la vallée ; au contact de l'eau froide, elle réapparaît. Ouf, c'est déjà ça, si ce n'est ce problème de paupières. Sa vue s'altère et elle n'aime pas ça. Descendre vers l'aval, vers l'aval, vers l'aval.

          - Un remède, un remède, je veux trouver un remède. Y en a-t-il dans la grande cité d'Oulan-Bator ?

         - Je ne sais pas si je tiendrais jusque là, mon amour. Mon état empire d'heure en heure, je ne vais pas tenir encore longtemps.

       - Que faire, alors ? Je suis désespéré. Pourquoi mentir ? Le blanc de tes yeux m'inquiète. Si tu meurs, je te suis, sans m'inquiéter de demain.

     - Misères.

Au loin, un nuage de poussière prend la rivière dans son panache, et remonte vers nos deux héros. Une cohorte de cavaliers apparaît devant leurs yeux ébaubis. Ce sont des mongols aux visages graves et aux moustaches serpentantes. La richesse de leurs parures fait savoir qu'il ne s'agit pas de n'importe qui, et qu'ils ne sont pas ici pour n'importe quoi. Ils s'arrêtent devant eux, et le plus âgé parle :

- Nous venons chercher la princesse. Mais qui êtes-vous, vous ?

Un soldat s'exclame :

- Je le reconnais, je le reconnais ! Il y a cinquante ans, il est venu dans notre cité. Il se disait voyageur.

Mon amie :

- Alors tu as déjà voyagé ?

Moi :

- C'était pour te voir.

Le soldat continue :

- Il l'a prise, et enlevée. Mon grand père l'a vu et l'a conté. Et c'est lui, c'est lui, c'est bien lui, c'est le voyageur aux traits saillants qui a enlevé à Oulan-Bator sa princesse.

Mon amie :

- Tu es un crétin, soldat, avant encore, nous étions ensemble.


Le plus âgé parle :

Ton infection oculaire disparaîtra là-bas. Suis-nous. Nous te soignerons en chemin.


Nous nous fîmes quelques signes, elle accepta.
Les soldats ne m'autorisaient pas dans le cortège, je la suivais de loin.
Après quelques jours de traverse, nous arrivâmes à la fière cité que j'avais ravi plusieurs fois par le passé.
Après le couronnement de la reine, elle disparut de la chambre royale pour se retrouver dans la mienne, à l'autre bout du monde.



jeudi 16 août 2012

Le sacrifice de l’apparence. L.Vazquez.

                                                                        



                                                                         Dans tes corps
                                                                         vertes

                                                                         Tu es si près de la mort











Et
C’est être race de l’homme.
C’est être dans.
Si.
Toujours.
Si.
Et si de.
Dans.

Et
Si.
Toujours.
Il tombait, comme toujours il
tombe
parce sans raison.
Chaque journée.
C’est être.
Si.

Et
Celui qui.
l’espèce.
Il tombait. Celui.
Qui corps.
Qui. Celui.
Invarié.
Qui se.
Livre.
Qui sale.
Sait.
Le, qui s’
élire
Corps
espèce.


Et
Celui qui.
Sans raison.
Large.
Et
Celui qui.
Se résout.
Consommé.
Celui qui
serait tout.
Celui qui
toujours.



De veille et de sommeil.
La veille et de sommeil.
La veille et le sommeil.



Et
De soi.
Déjà.
Sommet.
Tu
sais bien.

D’être.
l’Homme.
Qui

Tué.

Et
aujourd’hui.
Parce si.

Habitude.





Et
Parce  sans raison et si vraiment      large noire et     profonde. Celui            qui.
Parce      sans raison     morceaux                                morts qui         jambes
qui voulaient                     toucher                  quelque chose en dehors même.
De soi.     Comme il tombe celui qui.     Comme il.             Tu sais bien
sans raison.





Et
Au début             de toute expérience de l’humanité.                   sans raison.
Parce.                


                                                                                            

E                                                                                          Et
                                                                                            quelque chose.
Âpre de.
Fureur

corps.
Et
s’écroule.
Bouffie,
fatigué.       

corps.
Et
Tu sais bien.          
De parole
comme il, au fond.
Tous les jours.

Parce.

Corps.
Et
être de l’humanité.

corps.
Et
terre
Et
Jusque.


Et
Cette terre jusqu’à      parole,     c’est homme             de race d’homme.
Cette terre jusqu’à      parole, c’est    mammifère       qui sait bien se tuer.

Tout à fait prêts à mourir. Nous sommes.

Et
Cette terre,                                                 qu’il retourne avec sa langue.
Qu’il amasse                                            comme au fond     ses organes.

Nous sommes tout à fait prêts à mourir.

Et
Cette terre, comme il a, c’est une homme    cette                       volonté.
Cette terre, comme il                 mastication,                      c’est espèce.

Nous sommes tout à fait prêts à mourir.

Et
Cette terre, tu sais bien, tu sais bien que nous ne l’avons jamais dite encore.
Sans raison, sans raison      si peu                                    semblable.

Nous sommes tout à fait prêts à mourir.

Et
Cette terre à retourner avec la force   petits muscles  d’une langue.
Humaine, tu sais bien,  qui sait bien mourir            tue. Cette image.
Cette terre,    tu le sais,                            qui sait bien, cette image.
De cette terre dedans d’être humanité, il y a histoire d’un homme qui
veut      mourir et qui cette terre, qui sait bien,                cette image.

Nous sommes tout à fait prêts à mourir.


Et
Il y a un homme qui est un homme qui est un homme    qui est.
Cette image
une tête                                            rouge.
À force.                                                               Sans raison.



Nous sommes tout à fait prêts à mourir.




Et
Cette tête, si peu,     cette tête,  à force,             tu sais bien.

Nous sommes tout à fait prêts à mourir.



Et
Si peu semblable    aux routes,       abris,                               soi.                                          
Si peu semblable    à la première feuille                        de l’arbre.
Si peu semblable                      à lui-même et depuis si longtemps.




Imaginée.


                                                                 Nous sommes tout à fait prêts à mourir. 

Instant T = Pub

Le dernier roman de Guillaume Musso est déjà fini ? Et les histoires de Philippe Delerm, vous les connaissez déjà par coeur ?
Contre tous ces tracas du quotidien, il y a ceux qui maugréent, pètent et tempêtent.
D'autres, comme vous, achètent "Être là", plaquette de poésie du très très sérieux écrivain Guénolé Boillot, disponible au format Ebook.
Pour seulement 2 euros, vous ne passerez plus de longs moments de solitudes aux dîners de familles, entre Tati parkinsonienne et Tonton incontinent ! Pour seulement 2 euros, vous dis-je, vous avez l'assurance de discussions passionnantes sur les turpitudes métaphysiques et hallucinogènes d'un jeune écrivain qui n'a pas sa langue dans sa poche !
Soutenir la culture, c'est carrément chic de votre part ! Merci!

 http://www.lulu.com/shop/guenole-boillot/etre-l%C3%A0/ebook/product-20330990.html?fb_action_ids=4356679032184&fb_action_types=og.likes&fb_source=timeline_og&action_object_map=%7B%224356679032184%22%3A10151077198007973%7D&action_type_map=%7B%224356679032184%22%3A%22og.likes%22%7D&action_ref_map=%5B%5D

mercredi 15 août 2012

[R3PLYc4N] Robot (version longue)




"Robot (full version)" by R3PLYc4N
Sound+lyrics+video : R3PLYc4N

Ce morceau sera présent sur le CD-compilation "Sonopsie" qui sortira fin septembre sur le label Caméras Animales

samedi 11 août 2012

Le temps des réplicants


30 ans après Blade Runner, 46 ans après Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ?, le réplicant est devenu maintenant en 2012 incontournable dans les productions et représentations culturelles, l'imaginaire commun.
Au point que le film de réplicants devient un genre à part entière. 

En témoignent le film Prometheus, et surtout la série suédoise Äkta Människor (précédemment la série Dollhouse n'en était pas très loin, et Battlestar Galactica était en plein dedans).

Le mutantisme l'a vu, en proposant en 2006 le texte Réplicants et en choisissant le réplicant comme l'une de ses figures centrales. Une lecture (voix humaine + voix synthétiques) d'extraits de Réplicants a eu lieu le 21 octobre 2007 au Cercle Pan à Paris. (Détails >ici<).
Les réplicants sont des humains découvrant qu'ils sont des robots. Ils se distinguent des humains en ce qu'ils peuvent rejeter le système social, puisqu'ils n'y sont même pas inclus.

"Quand les hommes deviennent des machines, les androïdes aspirent à avoir des émotions humaines."

Prometheus (2012)

Äkta Människor (2012)

Dollhouse (2009-2010)

Battlestar Galactica (2004-2009)

***

Hors-sujet (?) : Humaines cherchant à imiter des poupées (2012)



mercredi 8 août 2012

Construire un camp de concentration à la maison


... relisez un classique du dark taste, l'essai de Ballard Kingdom Come ... suivez dans la rue une employée sensible, fragile psychologiquement, pour ne pas dire incompétente ... écrivez sur les murs : l'économie mondialisée est l'œuvre de psychopathes ratés ... mélangez le rayon viande et le rayon lingerie ... progressez vers un angle entre deux parois jusqu'à épuisement ... donnez-lui rendez-vous dans la cabine d'essayage interdite ... dites-lui qu'elle deviendra bientôt une astronaute sponsorisée et qu'elle ira sur le Soleil pour déloger le ver solitaire ... faites-vous civilisation de facturettes et de nains courbés ... trouvez un groupe d'investisseurs et proclamez-vous Homme ... contemplez ensemble la belle et grande montagne malade qui tend ses pattes d’aragne vers les flammes des bougies pour que ses ongles brûlent ... chassez l'ibis Wāq qui recouvre tout de ses excréments aux formes féminines ... offrez des colliers pour singes en or pur ... formez un groupe commando en la marquant au fer rouge de la formule : l'économie mondialisée est l'œuvre de psychopathes ratés ... inventez la lèpre future ... emplissez sa bouche de la dernière lueur du couchant ... enduisez vos corps à quatre pattes de firmament d'abattoir ... déshabillez-vous avec cet air triste ... d'une main invisible et manucurée arrachez des slogans de chair lumineuse tel que : investissez dans le marché amniotique ...