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vendredi 26 février 2021

FERMEZ. Mathias Richard


Fermez

Fermez les portes.
Fermez les écoutilles.
Fermez les fenêtres.
Fermez les yeux.
Fermez les cheminées.
Fermez les conduits.
Fermez les nuages, fermez le soleil.
Fermez tout.
Fermez les devantures, les portails.
Fermez les entrées et les sorties.
Fermez les routes, fermez les chemins. Fermez les terminus, les fonds, les sas, les courants les axes, tous les territoires.
Fermez les magasins, les épiceries, tout ce qui contient de la lumière.
Ouvrez la nuit, ouvrez les écrans, ouvrez les ténèbres, ouvrez le sommeil.
Fermez les vitres, fermez les respirations, fermez les bouches, les nez.
Fermez les parkings, fermez les salles, fermez les centres, fermez les accès, fermez chez vous, et même à l'intérieur de chez vous, et même à côté, fermez chaque chose, et même à l'intérieur de vous-même, fermez bien tout. Fermez les vannes, tous les tuyaux. Fermez les fermes, fermez les farmes, fermez les fourmes, fermez les firmes, fermez les familles, fermez les voitures, fermez les visages, fermez les vues, fermez l'eau, fermez la mer, fermez l'océan, fermez les quais, fermez la terre, fermez le feu, fermez l'air, oui surtout fermez l'air, surtout fermez l'air, fermez l'air.
Fermez les ronds, fermez les pupilles, fermez les iris, fermez les ronds-points, fermez les stops, fermez les voies, fermez les berges, fermez les églises, fermez les stades, fermez les marchés, fermez les marches, les rassemblements, dispersez les cendres, annulez les enterrements, et tous les mariages, fermez les cimetières, fermez les maternités, fermez les promenades, les balades, fermez les cagibis, les cabanes, les placards, les hasards, les maisons, les immeubles, les manoirs, les métros, les couloirs, les souterrains, fermez, fermez les trous, fermez les tous, fermez, toutes les ouvertures, toutes les respirations, fermez, fermez le futur, fermez le présent, fermez la mort, fermez la vie, fermez les possibilités, séparez, isolez, plus de toucher plus de peau plus de sexe, fermez, fermez les sexes fermez, enfermez les vivants, enfermez-vous les vivants, enfer, enfer vivant, enfermez les vivants, enfermez-les, tous, jusqu'au bout, jusqu’au dernier, fermez les avions, fermez les volets, fermez les cockpits, annulez les hélicoptères, fermez les ports, les aéroports, les transports, les bateaux, les stations, les ondes, les sex-shops, les concerts, les expositions, les théâtres, les cinémas, les cafés, les restaurants, fermez les lieux, fermez les endroits, fermez les envers, fermez les places, fermez les impasses, fermez les vasistas, fermez les paupières, les lèvres, serrez les dents, verrouillez les véhicules, les habits, ne respirez plus, fermez, fermez, fermez tout, fermez les formes, fermez les forces, jusqu'au néant, jusqu'à ce que tout devienne strictement immobile, jusqu'à ce que tout soit strictement séparé, jusqu'à ce que tout soit bien rangé et plongé dans des ténèbres complètes, jusqu'à ce que tout soit rien, calme, que cela ne respire plus, que rien ne passe ni dans un sens ni dans un autre, que rien, que rien ne se passe, que plus rien ne se passe, et tout cela, et tout cela, Au Nom de la Vie.
Fermez les dernières postes, fermez les guérites.
Fermez les cercueils. Fermez les cerceaux.
Fermez les cirques.
Fermez les clubs.
Fermez les zoos.
Fermez les festivals, les champs, les clairières. Fermez les falaises, les navires.
Fermez les rues, fermez les égouts, fermez les passerelles, les pontons.
Fermez la Terre, fermez l'Univers, fermez tout.
Fermez bien. Fermez tout. Fermez.











samedi 4 avril 2015

Seuls. Mathias Richard



Nous
qui
séparés
vivons.
Nous, la pâte de la vie, avons été séparés en petits morceaux.
Nous, la pâte de la vie, nous sommes séparés en petits morceaux.

Nous sommes nés
d'impossibilités accumulées.
Nous sommes nés
de surpopulations de solitudes.
Nous sommes nés
de quarante mille générations dans la merde à la suite.

De la naissance à la mort,
nous sommes une expérience,
celle de la solitude.

Seuls, seuls, seuls
Aussi seuls qu'il soit possible d'être seuls

Seuls, seuls, seuls
Nous sommes seuls, aussi seuls qu'il soit possible d'être seuls.

Comme dit
mon ami,
On
naît
seul,
on
meurt
seul.
Avec tout homme je suis seule. Avec toute femme je suis seule.
Seule, je suis seule. Avec les autres, je suis seule. 
Isolée, je suis seule. En compagnie, je suis seule.

Seul, seul, seul, nous sommes seuls, aussi possible d'être seuls qu'il soit possible d'être possible d'être seuls.
Seul, tu es seul ; avec l'autre tu es seul. 
Avec tout homme, tu es seul.
Avec tout animal, tu es seul.
Avec tout être, tu es seul.


tu es 
la personne la plus seule que je connaisse

La dure réalité te frappe. Tu vas passer le reste de ta vie comme cela - totalement seul. Une vie c'est vrai c'est court, mais d'une certaine autre manière c'est long, il y a beaucoup de jours dedans. Et beaucoup de minutes dans chaque jour. 

À une époque je cherchais les gens les plus proches. Maintenant je cherche les moins loin.

Les seuls appels que je reçois sont des erreurs téléphoniques. 
Les seuls courriers que je reçois sont des publicités (et des factures).
Mes seuls amis que j'ai sont les caissiers de chez Auchan
et la boulangère parmi tous ses clients.


Je suis si sssssss- rien à foutre rien à foutre rien à foutre - Je suis si sssssss- rien à foutre rien à foutre rien à foutre – je suis si sssssss – rien à foutre rien à foutre rien à foutre


il est dangereux de rester isolé plus de quelques années 

avec soi-seul pour voir, avec soi-seul pour entendre, avec soi-seul pour se souvenir, avec soi-seul pour sentir, avec soi-seul pour penser, avec soi-seul pour jouir, avec soi-seul pour souffrir

Le héros finit sa vie seul, constamment couché, en regardant des vidéos de Laurel et Hardy. 


Seule cellule lisse et sale ; dans la solitude sans nom et sans fond de la solitude qui n'a pas de nom et pas de fond. Dans la solitude sans nom et sans fond de ce qui n'a pas de début et de fin. Dans la solitude sans nom et sans fond depuis le début et jusqu'à la fin. Dans la solitude sans nom et sans fin depuis le début et jusqu'à la fin. 
Seul esseulé dans la solitude de la solitude sans fond de l'être de sans nom.

Il y a un très grand vide en moi, 
du vide avec de l'acide dedans.
Il y a un très grand vide en moi, un vide qui détruit et ronge et aspire tout.
du vide avec de l'acide dedans

c'est vide à l'intérieur. C'est Vide À L'extérieur.
séparée de la ville et de la nature en même temps
séparée de soi et des autres en même temps
c'est vide à l'intérieur. C'est Vide À L'extérieur.

regarder un film encore plus triste que moi, ça va équilibrer tu crois ?

Un seul, deux seuls, trois seuls, quatre seuls, cinq seuls, mille seuls, sept milliards de seuls, aussi seuls qu'il soit possible d'être seuls. Seuls, seuls, seuls ; seuls comme la société. Seuls comme personne. Seul en silence. Seul, en silence. Seul en silence, seul en silence. Dans la solitude, parmi les solitudes. Comme un linceul. Seul est là, seul est lisse, lisse et seul, las et lisse ; (lisse et seul, las et lisse). 

Chacun a pour nom et prénom Solitude. (sola solita, solo solitou)

La clé de seul, j'ai la clé des seuls, elle ouvre sur un monde, j'ai la clé des seuls elle ouvre sur un monde.

Tu sais que nous sommes seuls mais tu ne le supportes pas.


Seul, seul, seul, seul.
On dirait que ce mot, « seul », a été fait pour toi.
On dirait que ce mot a été inventé pour toi.
On dirait que ce mot a été sculpté pour toi.
On dirait que ce mot a été dictionnarisé pour toi.
On dirait que ce mot a été fait pour toi.
Seul, seul, seul, seul :
On dirait que tu tiens absolument à ce que ce mot existe dans le monde et que tu tiens à en être l'incarnation la plus exacte.
Seul, seul :
On dirait vraiment que tu l'aimes ce mot, et que tu voudrais explorer ce qu'il veut dire, que le dictionnaire c'est pas assez pour en faire une définition, tu voudrais en être une définition qui marche dans le monde. 
Seul, seul, seul. Aussi seul qu'il soit possible d'être seul. Aussi seul qu'il soit possible d'être seul. 
Aussi seul que le soleil.
Aussi seul que la solitude.
Aussi seul, aussi seul, aussi seul, aussi seul.
Aussi seul, aussi seul, aussi seul, aussi seul.
Aussi seule qu'une saucisse qui scie le sol.
Aussi seul que le sol scié sur une saucisse.
Aussi seule qu'une salle, aussi seule qu'une saoule, aussi seule qu'une cile, aussi seule qu'une sanle, aussi seule qu'une sulle...
Nous sommes des entités séparées, nous sommes des cellules. 
Chacun est une cellule entourée de vide. Dans chaque millimètre entre chaque personne, il y a une infinité de vide. Dans chaque centimètre entre chaque personne, il y a une infinité de néant. Et plus on se rapproche, et on peut se rapprocher de très près, plus ce néant est compressé mais existe toujours. 

Autour de chaque personne, il y a des cercles et des cercles, et des gouffres, et de l'écho, et autour de chaque personne il y a des couches de vide et des couches de néant superposées, Et autour du vide il y a du néant. Et autour du néant il y a du vide. et autour de chaque personne il y a une couche de vide et une couche de néant et une couche de vide et une couche de néant.

Seuls, nous sommes seuls, nous nous racontons des histoires, nous inventons des histoires, seuls, nous sommes seuls. Entre chaque personne, il y a des néants et des infinis infinis. Entre chaque personne, il y a des milliards de kilomètres de vide et de néant infranchissables, même peau contre peau. Même peau contre peau, entre chaque personne il y a des milliards de kilomètres de vide infranchissables.

Nous sommes des cellules séparées, qui souvent aspirons, à l'indifférenciation.


elle est déseulée
d'être si seule
elle est décelée
d'être si seule

seule comme le jour, seule comme l'amour

si seule
la plus seule des seules
la plus purement seule des isolées
entourée de murs de vide et de néant
elle fit de la solitude sa grande spécialité  

seule de la manière la plus terrifiante
la seule saoule marche seule sur le sol sous le soleil

Seule comme une saoule entre le sol et le soleil.

Aussi seule qu'une saoule entre le sol lisse et le soleil sale.

Aussi seule qu'une lasse saoule entre le sol lisse et le soleil sale.

Aussi seule que personne. Aussi seule que le silence, les  yeux au plafond. Seule, danse. Si seule qu'elle pense. Elle est si seule que pense. Qu'elle pense, aux os. Elle est si seule qu'elle pense aux os. 

Aussi seule qu'une lasse saoule en laisse sur le sol lisse. Aussi seule qu'une lasse saoule en laisse entre le sol lisse et le soleil sale. 

Aussi seule qu'une lasse cellule saoule en laisse sur le sol lisse sous un soleil sale et salé.



Là où nous sommes, personne ne peut nous voir, personne ne peut nous prédire, nous pressentir, personne ne peut se souvenir de nous.
Là où nous sommes, nous sommes seuls, définitivement, seuls, nuls et non avenus.
Seules des particules dans les pierres, dans l’air, dans la poussière, se souviendront de nous.
Seules des particules dans les pierres, dans l’air, dans la poussière, savent que nous arrivons. Le temps de notre passage, nous avons un contrat à respecter, un contrat avec la vie, le prix est la solitude, on n’a rien sans rien.
seuls les vivants sont seuls
seuls les vivants sont seuls
seuls les vivants sont seuls
seuls les vivants sont seuls


J'ai la clé des seuls, elle ouvre sur un monde.
J'ai la clé des seuls, elle ouvre sur un monde.

De la naissance à la mort, 
nous sommes une expérience, 
celle de la solitude.

Dans un dernier souffle, 
seule par terre, 
dans le noir, 
elle accouchera.



lundi 22 avril 2013

Point de saturation minimal

Demain. Et non un autre jour.

Lever du soleil. Prendre le chemin de la forêt / parc le plus proche. De quoi grignoter le midi + une bouteille d’eau.

Y passer la journée / proscrire tout contact social / hors urgence vitale.
Se perdre.

Revenir au crépuscule. Constater comment le monde s’est organisé pour tourner sans soi / comment survivre en dehors.
Éliminer toute trace de mobilier objet décoration / tout... vider pièce principale du logement.

Nu / sur le sol / calfeutrage / obscurité maximale.
N’en sortir que quand but parfaitement clair / celui réclamant totale intransigeance pour la suite de vos opérations dans ce monde.

Vous devez mourir.

Puis / retrouver premier souffle.
Face à la saturation. Avant black-out de votre black box.

Nettoyage par le vide / croyances / systèmes / concepts / ego.

Découvrir ce qui est / restera.

Socle / coeur.
Devenir indestructible.

Atteindre ce point : saturation minimale

jeudi 30 août 2012

Manifeste du Mur Bruitiste (HNW) (2008)


"L’individu n’a plus d’autre alternative que de refuser en masse la vie contemporaine promue et prônée. Le comportement juste se trouve dans le bruit et le repli, dans un refus de capitulation à la manipulation, à la socialisation, au divertissement.
Le Mur Bruitiste ne promet pas de redonner un sens et des valeurs à l’existence vécue. Le bruit opaque, morne et continu permet une réduction phénoménologique totale, un moyen contre l’interpénétration existentielle: désengagé dans l’apaisement bestial pur et inaltéré.
Le Mur Bruitiste est pro anomie, l’anomie volontaire. Il remet en question l’institution de toute relation, annihile tout ce qui survient dans un repos menaçant.
Le Mur Bruitiste est une récusation sociale. Il récuse toute notion de groupe, communauté, organisation et admet l’alternative de la claustration postmoderne hikikomori. Le refus est dans le repli car tout acte –qu’il soit considéré futuriste, dada, situ, anarchiste ou straight edge- est devenu inapte. L’actionnisme du délabrement ne peut faire face à la récupération factice, à la prostitution, de notre civilisation dérivative.
Observer l’extérieur abject ne doit être qu’un dernier rappel du non-sens humain avant l’épochè contestataire. Toute chose et tout être deviennent sans signification.
Le Mur Bruitiste est la perte de conscience du temps pour vivre en abîme et se laisser couler dans l’instant.
Le Mur Bruitiste est la perte de conscience physique.
Le Mur Bruitiste est la pratique ininterrompue du bruit mental.
Le Mur Bruitiste est la pureté militante dans la non-représentation.
Vigilants des derniers soubresauts, adoptons une nouvelle posture dans le repli – ni soumission, ni fuite, ni fléchissement – afin de pouvoir affirmer « je n’ai jamais été là » dans le désert créé par l’effacement de notre environnement. Perdre tout espoir est la liberté.
Dans l’isolement du mur bruitiste, le néant cellulaire, devenir son ombre - impassible meurtrier de soi - et ainsi devenir l’ombre de l’homme, inconnaissable, impersonnel.
Dans le Mur Bruitiste, aggraver son être, se tenir ignoré et ignorant de tout ; le repli exige l’élaboration d’une indétermination pure qui se forge dans l’oubli des éléments contraignants émotionnels et intellectuels.
Le Mur Bruitiste, obscurité d’un calvaire spirituel, est la non-opposition entre l’être et le néant, une berceuse sans fin.
Le Mur Bruitiste répand ses vertus occultes par les vrombissements et les bourdonnements de ses formules hermétiques, il désagrège et appelle à la désintégration irrévocable."

Je ne suis pas vraiment d'accord sur le fond, avec l'isolationnisme hikikomori, le côté pro-autisme, le nihilisme "délabré", mais bon, je trouve le texte très bon en lui-même, et toute personne tripant sur la musique a un moment ressenti (et donc comprendra) ce qui est dit ici. La jouissance souveraine du bruit/son pour mettre à distance une civilisation à chier, un monde à vomir.
Ce manifeste "Vomir" daterait d'octobre 2008, si j'ai bien compris l'auteur est Roro Perrot. Son site : www.decimationsociale.com
Cela m'est arrivé via Lucille Calmel, elle-même via Cdrik Croll, merci à eux.