Infirme des vieilles théories. Infirme des pensées et contre-pensées, des soupèsements et contrebalanciers. Infirme des génies passés, infirme de leur perfection, du reproche de leur perfection. Fort de leur reproche, car l'ayant écouté, mais constamment à la limite d'en être broyé ; leur souffle pousse en avant, sur d'étroits chemins de falaise, au bord de beautés difficiles à soutenir des sens, des beautés déjà décrites par d'autres expressions, d'autres mots, d'autres formes, des beautés étouffantes, sur lesquelles il faudrait apprendre à marcher, car le petit chemin trouve sa fin, et les souffles ne s'effilochent pas d'une bouche, et le doute serre le cœur, alors qu'il faut poser le premier pas sur l'invisible, sa propre force apprise et récitée comme une formule magique, mais il y a d'autres forces, d'autres tourbillons, des souffles contraires, des vides, et ce ventre qui a faim, et les pieds qui souffrent, et la tête vertigineuse, n'est jamais préparée au précipice, et le cœur tremble, car il ne sait plus si c'est une question de force ou de hasard, tout l'être tremble, car il est vierge de lui-même, il ne s'est pas pénétré assez profondément, il ne s'est pas arraché cette cuillerée exceptionnelle, il n'en sait rien en fait, et ce pas à faire, quelques dizaines de mètres au-dessus de l'eau, et des pierres qu'elle couve, ce pas à faire se marine se condense se controverse, ce pas à faire n'est pas encore fait.
[Ecrit en 95 (?) - publié dans la revue Décharge n°89, septembre 1996, p.26]
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