Synapses Attack ! =!-(
Quelque part en Afrique, dans la décharge d'Agbogbloshie, un message tourne en boucle sur le moniteur d'un ordinateur devenu paranoïaque.
« Ben
pote regarde ce qu'il y a ce que l’Amérique à offert
aux gens tu vois comment ce que l’Amérique à offert aux gens voilà et
maintenant c’est devenu des obscènes des obscènes parmi les obscènes ils n'ont
rien à foutre de leurs fils rien à foutre de leurs filles tu vois comment ils
baisent ils mangent ils boivent voilà pote c’est la vérité »
L’ordinateur murmure le fil de sa pensée,
un miroir-brisé. Un écran lumineux, une intelligence artificielle et enfermée
dans un cocon de métal.
« Ils n’ont rien à foutre de leurs
copains ils n’ont rien à foutre de leurs amis c’est la vérité pote regarde la
preuve pote ils n’ont rien à foutre ils n’ont rien à foutre ils mettent des
gens dans des situations voilà et après ils se demandent pourquoi ça leurs est
arrivés à l'avance dans d'autres contextes pas que dans le contexte de la
barbichette blanche ou le spectre lumineux ou l’histoire de la monnaie »
Charabia à sens unique. Métronome déréglé.
Bug dans le système. Charivaris du sable contre le vent
« Tu vois comment pote c'est ça que
je veux leurs faire comprendre ben pote regarde ce qu'il y a ce que
l’Amérique c'est des obscènes des
obscènes parmi les obscènes »
Un écran noir et lumineux dans le délire
d'une nuit d’été.
« Ils n'ont rien ils baisent ils mangent
ils boivent voilà pote c’est la vérité ils n’ont rien à foutre de leurs
copains »
L’écriture automatique défilait. Projetée
sur un panneau signalétique, elle débitait un flow de mots-pixels comme les
dernières paroles d'un homme condamné aux limbes d'un formatage automatique.
-
« Ils mangent ils boivent voilà pote c’est
la vérité ils n’ont rien à foutre de leurs copains ils n’ont rien à foutre de
leurs amis c’est la vérité pote regarde la preuve pote le FN pas content pote bleu
blanc rouge pote et badaboum bada… »
Sur le panneau rouille et lumière, il y avait
cette avertissements, ces quelques mots :
Surveillance par BodyCam.
Loi du 30 décembre 03 après l'I.A.F. ( Intelligence
Artificielle Forte )
Zone
Police d'Agbogbloshie
100003
Agbogbloshie
Tel :
01 / 01 01 01 00
E-mail :
bodycamsurveillance@agbogbloshie.com
Des mots-avertissements aux accents oxydés.
« Viens près de maman, on va
lire. » murmure une mère à son fils, dans le contrebat de la méga-décharge.
« Halte la ! » hurle un BodyCam
face au miroir éclaté de sa chambre d’adolescent.
« Et la colle, tu l as snife aussi ? »
rêve le voisin de l'ordinateur paranoïaque.
« Iloveyouiiiloveyou » nous dit Dieu.
« 1+1=3 » nous martel les Hommes.
« Demain, je reviendrais » rie le
clown drôle-pas.
« Hier j'ai vu le président se faire
shooter dans le dos » discutent 4 gosses dans le château « Azerty ».
Château de claviers. Le cimetière de la langue des anciens, celle des premiers
mammifères avec des jeans « Levi’s ». « Sick Sad World »
Gravé sur la surface striée de l’hémisphère gauche. « En direct de Bagdad,
Mickey mouse pour DisneyChanel ». « La conséquence ou la cause,
qu'importe ». « Humain, trop humain ». « Qu'est-ce que ça
fout, combien ça coûte, le meilleur sinon rien. Etes-vous sur d’avoir la
meilleur assurance ? Que deviendra cet héritage ? ». « Ce
soir, sur AgbpgbloshieTv©, la rediffusion du 11 septembre en HD Audio et Visio
Cam ».
Le BodyCam arrive par la face-nord de la
décharge. L’ordinateur paranoïaque fait trop de bruits. Vote-populaire : mise
à mort par rétrovirus. La leucémie dans le chargeur. Insuffisance médullaire,
anémie, fièvre, septicémie, hémorragie, il y a assez de balles calibres-lymphocytes-B-en-mutation
pour créer l'explosion d'une centaines de bombes atomiques dans les nervures
sanguines de son organisme de fer. « La mort sera lente » pense-t-il
derrière sa visière holographique. « la m-mort sera b-b-b-brutale » bégaye-t-il
d une voix-erreur404. L'arme à feu est braquée dans le vide. Une simple danse
mécanique. Ce besoin de bouger, faire quelque chose, qu’importe. Regarder
devant lui. Rien, le vide, juste un minuscule rectangle de lumière bleue dans le
ciel, sans lune, d’une nuit d’été. Un pas après l’autre. Flash ! Les
flammes d’un feu a ciel ouvert. Celui du plastique de milliers de fils
électriques brûlant à l’unisson. Le regard braqué sur le sol noir gorgé de plomb, d'arsenic et de cadmium.
Ratures sur papier griffé d’un sol en damier. Un pas après l’autre. Case noire.
La jambe droite. Case blanche. Deux pieds sur le sol foulé. Un simple jeu, la
mécanique d’une habitude bien huilée.
« I’m
singin’ in the dust. Just singin’ in the dust » chante-t-il d’un sourire
poussière d’ange avant de lever la tête vers un ciel sans lune. Un pas a
gauche, les bras levés et les semelles claquant le sol noir toxique et blanc de
plastique, « I’m laughing at clouds » chantonne-t-il en faisant
tournoyer son arme autour de l’index. La visière holographique replacée au
dessus de sa tête, à la manière d’un chapeau melon, le BodyCam lève la jambe
droite avant de tourner sur lui-même et s’en retourner enfant de la nuit. « In the dust... In the dust... »
Du
bas de la colline, le BodyCam pouvait entendre la chose parler à son reflet
déformé.
« On peut dire t’es chez moi t’es
chez toi tu vois je suis chez nous voila je peux dire je mange je bois tu vois
comment mon argent ton argent l’argent des autres les gens ils peuvent dire il
est fou elle est folle tu vois comment ça me plait ça me plait pas tu vois
comment l’Amérique pense qu’on travail pour eux c’est ça que tu dois te mettre
en tête ils croient qu’on travail pour eux ils croient que c’est leur argent
que c’est de leur poche tu vois comment c’est pas des conneries ce que je dis crois
moi pote crois moi » Supplie-t-il aux fantômes, l’écran baissé comme face à un
torse de métal, de plastique et de chair fantasmée.
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