jeudi 1 avril 2010

Do it yourself

Do it yourself


Dans ce temps là ma tête n’avait qu’une seule veine, mon sang coulait avec une si grande force que je ne pouvais m’empêcher de l’accompagner : ratatiner, m’emplir, ratatiner, m’emplir, ratatiner, … je réalisais les secousses qui m’animaient.

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Lors de son passage toute proie me dévie fortement. Si elle me tourne autour elle va avoir tendance à déformer ma surface et l'entraîner dans sa rotation, jusqu'à me détacher un bout. Ainsi happée par une proie ma matière ne se décale pas sans élasticité et se résorbe à moi plusieurs fois avant d'être engloutie dans l'autre.

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J’avais un ventre avec la terre, et soulevé de terre. Notre ventre. Par lui le sol me relançait, il repartait de mon corps mais sans moi.
D’entortiller ses galeries la terre m’excave des intestins.

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Au niveau digestif, le plus souvent ils m’atteignent avec leurs mains (plus rarement à coups de pied ou de dents), ma peau accompagne leur coup en se relâchant dans les autres zones tandis qu’elle se roule en filaments où ils me touchent. Ces émissions s’étirent et se rétractent, ce qui leur permet de me ramper au long de la proie, à force de m’enrouler autour pour l’immobiliser et augmenter la surface de contact entre elle et ma membrane digestive elles m’essorent, appliquant ainsi un film de fines gouttelettes : le film se disperse et se réassemble dans la peau, se mélangeant à l’aliment cette langue le malaxe tout en permettant de m’y ancrer. Lorsqu’il cède sous l’adhésion de ma membrane, par répercussion celle-ci s’invagine, je n’ai plus qu’à ingurgiter : la paroi musculaire se rétrécit puis propulse la portion de langue et de nourriture lentement vers la suite du tube digestif.

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Du doigt, en me frottant la peau, je parviens à l’excaver. Suffisamment profond le trou suinte de telle sorte que son opercule se réduit sans jamais pouvoir se refermer. Je peux alors m’y incorporer un grain de sable et m’en servir dans la masse du liquide comme balancier, les percussions du grain contre les parois me permettant de déterminer si je monte ou descends un escalier, me penche ou me rétablis. Mais le grain malheureusement constitue un perfectionnement si sensible de mon être qu’il subit des secousses au moindre son, mon sens de l’équilibre prenant le développement d’un organe de l’audition.
Il me faut alors travailler ma stabilité en toutes circonstances d’audition. Par exemple, alors que je me trouve les épaules plongeantes, un hurlement m’étend les deux jambes en coup de frein. Ou encore lorsque d’accélérer je cabre, rejetant tout le poids de mon corps sur mes fesses et la tête fuyant en arrière, le crissement d’un gravier me tire le sol vers le ciel. Il s’agit alors de réduire l’angle qu’ont les fréquences sonores avec les secousses de l’horizontalité, cela me donne moins de plongée mais aussi de cabrage, car de s’égaliser son et équilibre s’appuient mutuellement et allongent la période de suspension entre chaque appel du pied, m’intimant une allure dilatante dans la course, qui n’ajoute pas de pas au pas, mais m’immobilise. Puisque je ne peux évidemment pas accélérer ou détendre la pression à l’intérieur du grain, je modèle mon sexe en le roulant avec les doigts, mais comme je ne parviens pas à suffisamment l’amincir, pour en faciliter l’introduction je dois tirer le pavillon de mon oreille. Dans le conduit le sexe se maintient encore comprimé quelques secondes, avant de s’adapter de lui-même aux parois.

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La marmaucha Mudi-esquia - on parle de cette bête (marmaucha) de l’embouchure de l’Adour jusqu’au nord du Marensin lorsqu’on retrouve un cadavre évidé de son échine et certains os ; comme on voit la bête après avoir tué un homme marcher debout, mais galoper quand c’est un cheval, on pense qu’elle emporte les échines pour en changer.

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Peu après la métamorphose, je gagne la ville : je m’attaque aux voyageurs de préférence en mauvaise condition, en me fixant sur eux par ma bouche. En ventouse avec, à l’intérieur de sa lèvre circulaire, ses rangées concentriques de dents, je perce la peau de ma victime par raclage et suce le sang. Puis la pâte s’approfondit et je pénètre à l’intérieur du corps que je dévore complètement au moyen de ma langue râpeuse. Lorsque le voyageur est affaibli, je me détache et vais en choisir un autre.

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Pour assimiler ensuite la proie à mon sang, sans trop fatiguer les aires d’échange, j’ai des rehauts. Dans un segment du tube digestif qui contient une abondante quantité de liquide, l’air coince par des spasmes et des coudes ; le procédé consiste à effectuer des rotations du volume intestinal, les gaz cognent alors et dans leur tentative de passage valdinguent l’intestin d’une veine sur l’autre.

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Ensuite il me pousse des yeux. Les adultes peu après la poussée des yeux se laissent emporter par le courant et meurent.

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J’en profite pour passer une annonce. Je vends mes os.
Mes os permettent d’atténuer les coups forts, sans endommager leur environnement. Ils s’adaptent à la forme du poing ou des dents, assurant une excellente réception et accompagnant le corps étranger en moi. La texture de mes os, lorsque l’on me coupe, particulièrement lisse et douce, offre un contact agréable et ne procure aucune gène. Ils sont idéaux pour des activités en milieu violent.

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L’œil tourne en se dédoublant par le milieu, avant de restituer sa pupille sur une position plus centrale. Dans le même orbite les deux sphères se gênent, mutuellement elles se repoussent. Mais sous l’effort de la pupille qui tire dans tous les sens, comme affolée, par un bercement léger, la différence de pression entre les deux globes augmente et crée un appel de substance qui atténue leur ligne de contact et les canalisent, après quelques crispations ne me regarde plus qu’un seul œil. Se maintient un dénivellement du globe oculaire.

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