À l’origine, le gardien d’exposition mutantiste est un simple préposé à l’accueil et à la surveillance d’expositions d’art contemporain, souvent constituées d’« installations » automatisées - sonores, visuelles (films et images et mots en boucles sur des écrans, sons et musiques et mots en boucles sur des enceintes), robotiques, olfactives (diffuseurs d’odeurs), voire tactiles.
À force d'être enfermé du matin au soir dans des expositions remplies d’installations tournant en boucle, le gardien d'exposition mutantiste développe une mutation : il-elle sait imiter toutes les installations par cœur, avec son corps !
Il peut produire avec sa bouche le même son, les mêmes mots et les mêmes mélodies que produisent les installations, de façon synchronisée avec ses gestes qui en reproduisent les images. Avec son corps il peut imiter les films projetés sur les écrans, exactement dans le même tempo que toutes les installations, même en leur absence, même sans l’exposition.
Il est devenu l'installation, il est devenu l'exposition, dansante, pouvant témoigner de celle-ci en tout lieu du monde, il l’incarne et la possède, mieux que tout visiteur, mieux que tout commissaire, que tout technicien, que tout éventuel acteur, et mieux que l'artiste lui-même !
Chaque seconde de l'installation qu'il a gardé pendant des mois, chaque seconde est en lui, et il peut, avec ou sans l'installation, la déclencher et l'imiter, comme on appuie sur un bouton, avec les moyens humains gestuels et vocaux, corporels, qui sont à sa disposition.
De chaque exposition, même démantelée depuis longtemps, il sent les odeurs fantômes, il peut les décrire précisément, alors que les diffuseurs d’odeurs n’existent plus.
L’agent d'explosition. Dans sa tête, l'installation est complète.
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